Effets délétères cardiovasculaires et pulmonaires de la pollution atmosphérique par JP Bounhoure.


EFFETS DELETERES CARDIOVASCULAIRES
ET PULMONAIRES DE LA POLLUTION ATMOSPHERIQUE

Par M. Jean-Paul BOUNHOURE

Depuis plus de 20 ans de nombreuses études épidémiologiques et des travaux expérimentaux ont montré que la pollution atmosphérique aug- mentait la morbidité et la mortalité cardiovasculaire et pulmonaire dans la population générale, principalement dans les communautés urbaines. La pollution de l’air ambiant représente aujourd’hui un problème majeur de santé publique. L’exposition aux différents polluants provoque des effets délétères à court et long terme, favorisant une pathologie bronchique et pulmonaire, facilitant l’athérogénèse, semblant précipiter l’évolution de lésions athéroscléreuses latentes. (1-2-3-4).

Bien que depuis 1990, la masse des polluants émis dans l’atmosphère ait régulièrement baissé, l’OMS considère que plus de 3 millions de décès par an sont attribuables à la pollution atmosphérique qui s’accroit dans les zones urbaines des pays en voie de développement. Une étude européenne attribua 6% de la mortalité globale, 2% des hospitalisations et près d’1% des infarc- tus du myocarde à la pollution dans les milieux urbains (5). Une étude a mon- tré que sur les 42.000 décès attribuables a la pollution plus de la moitié était due aux émissions du trafic routier. A Toulouse dans une population âgée de 34 à 64 ans, 4 à 5% des infarctus pourraient être attribués à ce nouveau fléau (6). Même si les risques sont faibles en comparaison de ceux induits par les autres facteurs de risque cardiaques, la prévalence universelle de l’exposition fait que le nombre d’événements cardio-pulmonaires attribuables à la pollution est important. Les troubles cardiovasculaires sont la conséquence d’une réaction inflammatoire au niveau des poumons et des vaisseaux, d’une stimulation sympathique, du rôle thrombogène des polluants facilitant la sur- venue d’événements coronariens aigus, d’arythmies et de poussées d’insuffisance cardiaque. Liée au trafic automobile, aux fumées industrielles, aux conséquences du chauffage domestique, l’exposition chronique aux particules fines, aux polluants photooxydants, justifie des mesures de prévention qui doivent inciter à des progrès technologiques, à un contrôle rigoureux de la qualité de l’air, à des directives nationales et internationales précises pour réduire les émissions de polluants.

I Directives

L’amélioration de la qualité de l’air constitue à l’évidence un enjeu majeur pour la santé publique et notre environnement. Au niveau international l’OMS a défini pour un grand nombre de polluants des valeurs guides de concentration de l’air extérieur à atteindre par les états pour réduire les impacts sur la santé. La Commission Européenne a proposé comme objectif pour 2015 dans les normes EURO IV et V la division par 10 des émissions de polluants pour les véhicules diesel neufs et par 2 ,5 celles des oxydes d’azote pour tous les véhicules récents. Le plan National Santé et Particule 2012, élaboré lors du Grenelle de l’Environnement, a émis des directives dans les secteurs industriels, agricoles, domestiques, celui des transports, pour réduire les émissions toxiques. L’objectif principal est la diminution de la pollution de fond par les particules de manière quasi permanente et non pas la seule prévention des pics de pollution. A la demande du Ministère de l’Environnement le Centre Interprofessionnel d’Etude de la Pollution atmosphérique (CITEPA) remplit la fonction de Centre National de référence des émissions dans l’air. Localement l’ORAMIP surveille la qualité de l’air en Midi-Pyrénées, à partir de stations de détection fixes et mobiles, localisées à proximité des autoroutes et des rocades, des zones industrielles, mais aussi dans les communautés urbaines. Sa mission est triple : « Surveiller, Prévoir, Informer ».

A partir de seuils de pollution cet organisme émet des niveaux d’infor- mation et des niveaux d’alerte pouvant inciter les Préfet à des mesures de restriction du trafic.

La nature de la pollution atmosphérique

Une distinction doit être faite entre les polluants gazeux et les particules fines en suspension :

  • Les polluants gazeux, liés au trafic automobile, incluent les oxydes d’azote, avec le mono oxyde et le dioxyde d’azote (NO2), le monoxyde de carbone, le dioxyde de soufre. Le monoxyde de carbone provient du trafic automobile et du mauvais fonctionnement des chauffages. L’ozone provient de la réaction photochimique de certains polluants primaires en présence du rayonnement solaire et d’une température élevée.
  • Les particules fines en suspension sont produites par la circulation automobile, par des chauffages fonctionnant au fioul, par les résidus de la combustion du bois et les travaux agricoles. Ce sont des composés très hétérogènes classés selon leur diamètre aerodynamique (μm). Elles sont composées d’un agglomérat de centaines de constituants, dotés d’un potentiel toxique. hydrocarbures, métaux, agrégats de poussières, de pollens, de résidus de combustion, d’hydrocarbures. Elles sont de différentes tailles, les plus souvent étudiées étant celles dont le diamètre est inférieur ou égal à 10μm (PM10) celles dont le diamètre est inférieur à 2,5μm, (PM 2,5) et les particules ultrafines avec un diamètre < 0,1μm. Leur impact sur la santé a été évalué par des études épidémiologiques. Plus elles sont fines, plus elles pénètrent dans l’arbre respiratoire avec des effets directs vasculaires. Les nanoparticules, < 0,1 μm sont l’objet de beaucoup d’attention. Les particules les plus fines, incorporant des composés métalliques, des composés organiques complexes créent une inflammation pulmonaire et après translocation dans la circulation in- duisent des effets vasculaires toxiques.

La composition chimique des particules varie et dépend de leur origine, des conditions météorologiques, du pourcentage des composés inorganiques et organiques. Les principales sources des particules fines sont les émissions de gaz d’échappement, les fumées industrielles et les résidus du chauffage domestique.

La pollution hivernale est favorisée par l’humidité et les brouillards. Conséquence du chauffage, du trafic automobile, des industries, elle com- porte de fortes concentrations de particules fines, d’oxyde d’azote de dioxyde de soufre. L’été, la chaleur et l’ensoleillement favorisent la formation d’ozone à partir d’Oxyde d’azote, de composés organiques volatils et de CO.

On ignore si les effets systémiques de la pollution sont expliqués par la seule inflammation pulmonaire ou la translocation de particules polluantes de l’espace alvéolaire dans la circulation L’instillation intratrachéale de particules de très petite taille chez le hamster crée des lésions de l’endothélium vasculaire, des anomalies biologiques aboutissant à la formation de micro thrombus dans l’arbre vasculaire. (7)

I-Mécanismes des effets délétères

Plusieurs mécanismes ont été proposés pour expliquer les effets pulmo- naires et cardiovasculaires nuisibles de la pollution atmosphérique mais encore beaucoup d’incertitudes demeurent. Des études humaines et expérimentales animales démontrent que l’inhalation des polluants de l’air ambiant entraîne leur diffusion dans l’arbre respiratoire, leur passage à travers les membranes alvéolaires et l’endothélium vasculaire, induisant une inflammation aiguë et chronique des voies respiratoires :

•Au niveau pulmonaire survient une broncho constriction réduisant les flux ventilatoires, favorisant l’apparition et l’aggravation de crises d’asthme, l’apparition d’états de mal asthmatiques et à la longue une insuffisance respiratoire.

• Au niveau de la circulation, une dysfonction rapide du système nerveux autonome, une stimulation sympathique, l’inhibition du tonus vagal,causent de la tachycardie, une réduction de la variabilité sinusale et facilitent la survenue de troubles du rythme cardiaque. Surtout certains polluants ont de nombreux effets biologiques délétères : augmentation de la viscosité sanguine, activation plaquettaire, effet coagulant, source de thromboses vasculaires. On a constaté après des épisodes de pollu- tion intense, une augmentation des facteurs de coagulation, des taux de fibrinogène, une agrégation plaquettaire et une réduction de la libération de l’activateur tissulaire du plasminogène.

Une dysfonction endothéliale apparait si la pollution se prolonge avec la réduction de la production d’un puissant vasodilatateur, l’oxyde nitrique, par l’endothélium vasculaire et l’émission de radicaux libres facilitant l’athérogénèse. L’hypercoagulabilité, la stimulation sympathique, la production de cytokines, facilitent des événements coronariens aigus, angor instable, infarctus du myocarde, accidents vasculaires cérébraux et poussées d’insuffisance cardiaque. (1-2-3- 4).

Ce sont surtout les particules atmosphériques ultrafines (< 2,5μ) et les hautes concentrations d’oxydants qui causent la libération de radicaux libres pro inflammatoires impliquant un stress oxydatif facilitant la formation de plaques d’athérosclérose. Médiée par les cytokines et les chemokines, cette action vasculaire à long terme conduit à un état inflammatoire subaigu avec des altérations des parois vasculaires. Le rôle cancérogène bronchique, pulmonaire et sur les voies respiratoires supérieures après des expositions prolongées pendant des mois et des années est bien démontré par des études expérimentales et épidémiologiques.

II -Etudes épidémiologiques

Des études épidémiologiques laissent apparaitre des liens récurrents et significatifs entre pics de pollution, la pollution atmosphérique de fond, pollution moyenne et effets à court et long terme cardiovasculaires et pulmonaires. A partir d’études convergentes, l’OMS considère que les polluants les plus préoccupants sont les particules en suspension, l’ozone et les dioxydes d’azote et de soufre pour l’air extérieur.

A- Etudes à court terme

Diverses études établissent les relations à court terme entre l’exposition aiguë à de hauts niveaux de pollution de l’air ambiant et les indicateurs sani- taires, pour des délais allant d’un jour à une semaine. Les études menées en Europe et aux Etats-Unis ont établi des résultats convergents avec des taux significatifs tant pour la mortalité que pour les hospitalisations dues à des événements pulmonaires et cardiaques lors des pics de pollution. Cette exposition à court terme fait référence à quelques heures ou jours d’inhalation d’un air très pollué. Mais il faut souligner l’intervention d’autres facteurs que la pollution, telles les conditions météorologiques, la température ambiante, le degré d’humidification, En fonction des vents, des précipitations, les polluants se dispersent ou stagnent dans l’air ambiant au niveau des grandes cités faisant de véritables aérosols toxiques. L’association de la pollution et du brouillard a eu des conséquences désastreuses, en quelques jours, dans la vallée de la Meuse en Belgique et à Londres en 1952. Le froid, l’humidité favorisent des pics de pollution, par les aérosols de particules fines, des oxydes d’azote, du dioxyde de soufre.

• Effets sur la Mortalité

Les études à court terme présentent des résultats assez convaincants moins contestables que ceux des études à long terme. Elles analysent la variation quotidienne de mortalité générale et cardiovasculaire en fonction des pics de pollution au-dessus des seuils de pollution. On ne peut citer toutes les études. L’étude européenne APHEA 2 (Air Pollution and Health), réunissant les données de 15 villes européennes démontre que les particules fines, PM10 et les fumées noires sont des prédicteurs de mortalité dans les régions étudiées. Quand les concentrations de PM10 et de fumées noires sont augmentées de 10 μg /m3 le nombre quotidien de décès augmente en moyenne de 0, 7% (8). Dans la National Morbidity and Mortality Air Pollution Study, un incrément de 10μg/m 3 de PM 2,5 dans l’air est associé à une augmentation de 0,41% de la mortalité totale et d’1,4% de la mortalité cardiaque. L’American Cancer Society constate que chaque incrément de 10 mμ/m3 de l’exposition annuelle aux PM, 2 ,5 est associée à une augmentation significative de la mortalité cardiovasculaire et par cancer pulmonaire. La pollution par les particules fines serait responsable aux USA d’au moins 400.000 décès par an. Pope dans sa méta analyse analysant des études épidémiologiques concernant les particules < 2 ,5 constate que chaque augmentation de 10 μg/m3 est associée à une majoration d’1 à 1,5% de la mortalité cardiovasculaire. L’augmentation est linéaire sans évidence de seuil. Hoek étudiant une grande cohorte hollandaise montre qu’une habitation et un séjour prolongé à la proximité d’une autoroute à grande circulation (moins de 100m) réduisent l’espérance de vie (risque relatif 1,05 IC 95%, 1,10- 3,52) (9)

• Morbidité

Une exposition à court terme à des taux élevés de polluants est aussi as- sociée à une augmentation de la morbidité cardiaque et pulmonaire, évaluée sur le nombre d’hospitalisations quotidiennes. Une majoration des taux PM10 de 10 μg/ m3 est associée à une augmentation d’1,45% des hospitalisations pour un événement cardiaque et de 2% d’hospitalisations pour un épisode broncho-pulmonaire. L’observation de 10 villes américaines pendant 9 ans révèle des élévations similaires d’événements cardiaques et pulmonaires pour chaque 10 μ/m3 de concentrations de PM10. Peters et col ont rapporté une augmentation de 48% du nombre d’hospitalisations pour infarctus après une exposition supérieure à 3 heures de PM 2,5 de plus de 25μg/m3 (10). Le risque d’infarctus peut être augmenté par un facteur de 2,73 seulement après une heure d’exposition à un intense trafic automobile. Les risques de la pollution sont minimes pour les individus sains, jeunes et sans pathologie mais le risque s’élève à partir de 65 ans en particulier chez les patients atteints déjà d’une pathologie cardiaque ou pulmonaire. Parmi les polluants gazeux, les polluants photo oxydants, ozone, oxydes d’azote, di-oxyde de soufre sont très souvent les causes d’une augmentation des hospitalisations pour épisodes coronariens aigus, Un excès d’admissions est constaté avec les taux élevés de monoxyde de carbone et de particules fines en cas de trafic automobile intense. Ruidavets et col ont conduit une étude prenant en compte les hospitalisations pour infarctus à Toulouse de 1997 à 1999 et les concentrations atmosphériques d’oxyde d’azote, de sulfures et d’oxyde d’ozone. Après correction prenant en compte les variables telles la température et l’humidité, le risque relatif d’infarctus aigu fut corrélé à une augmentation de la concentration d’ozone (valeur médiane 74,8μg/m3) le jour de l’hospitalisation et le jour suivant l’événement coronarien. Pour une augmentation de la concentration d’ozone de 5μg/m3, le risque relatif est respectivement d’1, 05 (p=0,009 ) et 1,05 (p=0,007) (6).

Des expositions brèves aux divers polluants peuvent représenter le fac- teur déclenchant d’une complication cardiaque ou vasculaire. Les événe- ments cardiaques rencontrés s’observent pour des fluctuations affectant des valeurs moyennes inférieures aux limites règlementaires (40 μgm3 pour les PM10, 110μgm3pour 03, 40 μG pour NO2, 125 μg M3 pour le SO2). On a constaté une progression linéaire du risque sans évidence d’un seuil. Outre les événements coronariens il faut citer l’augmentation des hospitalisations pour insuffisance cardiaque, arrêt circulatoire, accès de fibrillation auricu- laire, accidents vasculaires cérébraux. Le nombre de décharges des défibrilla- teurs à l’occasion de tachycardies ou de fibrillations ventriculaires augmente lors des pics de pollution (10). Au plan pulmonaire il apparait des épisodes respiratoires aigus, asthme, bronchites.

Etudes à long terme

La morbidité cardiovasculaire prenant en compte des événements coronariens et les troubles respiratoires graves justifiant une hospitalisation augmente de manière significative après une exposition prolongée à de fortes concentrations de polluants dans l’air ambiant. Mais les effets à long terme ne peuvent être évalués que dans de études de cohortes incluant un grand nombre de participants avec surtout des dizaines d’années d’exposition. Au plan vasculaire des expositions répétées, prolongées à des concentrations de polluants élevées pendant des jours et des semaines peuvent altérer la stabilité des plaques athéromateuses et faciliter des troubles de la coagulation source d’ischémie myocardique aigue. Mais la valeur des études épidémiologiques à long terme est souvent contestée : il faut des études prenant en compte des durées d’exposition très prolongées, évaluant de très larges effectifs et qui doivent tenir compte de pathologies latentes dont les complications sont facilitées par des pics de pollution ou une pollution moyenne annuelle élevée en moyenne. La pollution a long terme semble avoir des effets pathogènes chez des sujets à risque déjà fragilisés. L’étude de Harvard a inclus 8111 adultes avec un suivi de 14 à 16 ans. L’objectif était de mettre en évidence entre les villes les plus polluées et les moins polluées, une différence concernant la mortalité cardio-pulmonaire et l’exposition aux particules PM 2,5. Après correction tenant compte des facteurs confondants tels le tabagisme, l’âge, des pathologies incidentes, le risque relatif (RR) entre les cités les plus polluées et les moins polluées, était de 1, 36, IC 95% : 1,08-1,47) ; L ‘augmentation du risque de décès cardio-vasculaire, en moyenne, était de 16% pour une augmentation de la concentration de PM < 2 ,5 de 10μg/m3. Les auteurs ont constaté un excès de risque de 37% de mortalité d’origine cardio-pulmonaire, pour la ville la plus polluée. Une étude hollandaise a permis le suivi pendant 8 ans de 5000 individus vivant à proximité des autoroutes ; le risque relatif de mortalité cardio-pulmonaire est d’1, 95, (1,09-3,52 IC : 95%) (9). Pope et al étudièrent les relations entre les statistiques de mortalité pour une période de 16 ans et l’exposition chronique à de multiples polluants aériens pour une population de 100 millions d’ adultes résidant dans 50 états aux USA. Chaque augmentation en moyenne de 10 μg m3 de PM 2,5 élève le risque relatif d’1,32 [IC 95% 1,08-2,15] (12). Le suivi de 12.865 patients américains ayant des antécédents coronariens montre qu’une augmentation de 10μg m3 de PM2, 5 est asso- ciée à une augmentation de 4, 5% du risque de nouvel événement coronarien aigu (13). Si le risque majeur concerne l’infarctus, le nombre d’insuffisances cardiaques, d’arythmies, d’arrêts cardiaques est aussi augmenté.

Le risque de réadmissions pour infarctus par rapport à la pollution a été analysé dans l’étude HEAPS, cohorte concernant 22.000 survivants d’un premier infarctus. Pendant les 10 ans du suivi, 6655 réadmissions pour événe- ment coronarien survinrent, associées le jour de l’hospitalisation à une concen- tration de PM10 de 10μg/ m3. (RR : 1,21, 1,04- 1,039). Des effets similaires sont aussi constatés pour le mono oxyde de carbone, l’ozone et les oxydes d’azote (13). Une étude récente a réanalysé les données de l’American Cancer Society Cohort comprenant 22095 patients suivis pendant plus de 15 ans évaluant les risques des particules fines 2,5, et de l’O3 pour une population urbaine de 150 villes. Cette étude prit en compte de nombreux facteurs confondants. Le RR de décès par cardiopathie ischémique, exprimé pour des concentrations < 10μg/m3 en PM25 était de 1,49 (1,20-1,85) correspondant a une augmenta- tion de 6% des décès.

A.Maitre considère que 45% des Français vivent en niveau rural ou dans des villes de moins de 100000 habitants où la pollution est plus faible que dans les grandes cités (4). Cet auteur estime que près de 2% des infarctus sont liés à la pollution gazeuse et par les particules fines de plus de 10μg/mn3 et que l’on peut attribuer 7% de la mortalité par cardiopathie ischémique aux effets de la pollution atmosphérique.

Effets des différents polluants

  • L’ozone pour des concentrations supérieures à 240μg/m3 pendant 3 heures consécutives a des effets délétères cardiovasculaires, tachycardie, vasoconstriction coronaire, apparition d’ischémie myocardique. Elle favorise les événements coronariens aigus et des troubles rythmiques.
  • Le dioxyde de soufre (SO2), issu de la combustion des énergies fossiles et de la fonte de minerais de fer a des effets délétères broncho- pulmonaires et vasculaires. On constate pour des taux > 50 μg /m3 en moyenne pendant 24 heures des exacerbations d’asthme, d’événements bronchiques et un effet thrombogène. Les hospitalisations pour asthme sévère, arythmies, événements coronariens sont augmentées
  • Le monoxyde de carbone (CO) dû à la combustion incomplète des matières organiques, dont les sources principales sont le trafic automo- bile, le mauvais fonctionnement des chauffages, mortel à fortes concentrations, favorise des troubles neurologiques et cardiaques. Les patients les plus exposés sont ceux qui ont des antécédents cardiovasculaires.
  • Les pollens jouent un rôle pathogène majeur. Leur taux élevé, leur persistance dans l’atmosphère des villes avec une action conjointe à celle des autres polluants entraîne depuis 10 ans une augmentation importante des crises d’asthme et l’apparition d’états de mal asthmatique chez l’enfant. Le réchauffement climatique parait jouer un rôle. Les pollens émis par les cyprès, les oliviers stagnent longtemps dans les villes.Pour terminer rappelons les risques liés au tabagisme passif, le courant secondaire émis par une cigarette est plus toxique que l’inhalation de la fumée par le fumeur. C’est une source majeure et très dangereuse de pollution avec stimulation sympathique activation plaquettaire et augmentation des facteurs de thrombose vasculaire. Le tabagisme passif augmente la fréquence des affections respiratoires, l’incidence des infarctus du myocarde et de 25% au moins le risque de cancer pulmonaire.Quels sont les sujets les plus menacés ?

    Tous les individus n’ont pas la même sensibilité. Les effets de la pollution sont à redouter chez les sujets âgés de plus de 70 ans, les patients ayant des antécédents d’infarctus, une brochopneumopathie chronique, les asthmatiques, les insuffisants cardiaques. Mais des facteurs génétiques interviennent, en particulier le polymorphisme de gènes qui régulent la réponse au stress oxydatif et à l’inflammation. On ignore si des états associés à une inflammation chronique tels le diabète, le syndrome métabolique, les affections intestinales chroniques, la polyarthrite, amplifient les effets délétères de la pollution.

En conclusion, la pollution de l’air ambiant est associée à court et long terme à des complications cardiovasculaires et pulmonaires particulièrement pour des sujets à risque. Les populations urbaines, surtout les sujets âgés et les sujets ayant des antécédents vasculaires, dans le monde occidental et les pays en voie de développement sont les victimes de nombreux polluants émis par le trafic routier, le chauffage, les industries, et même les travaux agricoles Les effets sont constatés même pour des concentrations de polluants égales aux seuils réglementaires. Bien que les risques relatifs mis en évidence soient faibles, la prévalence universelle de l’exposition entraîne un coût sanitaire non négligeable.

La meilleure stratégie pour réduire les effets de la pollution est fondée sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, de la consommation excessive de combustibles fossiles, la réduction du trafic automobile et de l’utilisation du fioul. La généralisation des filtres à particules sur les voitures à moteur diésel est recommandée mais des améliorations techniques sont encore souhaitables. Leur effet devrait apparaitre dans les années à venir.

Il y a quelques décennies les mesures de prévention médicale, l’asepsie et une meilleure hygiène ont réduit le risque infectieux. Des actions similaires sont requises pour diminuer la pollution : la diminution de l’exposition aux particules fines contribue à des améliorations significatives de l’espérance de vie : la réduction de 10μg/m3 de particules fines est associée à une dimi- nution sensible des effets sanitaires et un allongement d’au moins 10% de l’espérance de vie. (14). Une étude réalisée à Dublin estime que plus de 240 décès par an d’origine cardiaque ont été évités depuis qu’une décision poli- tique réduisant le trafic automobile en ville a eu pour effet la réduction des principaux polluants.

Des progrès restent à faire mais des progrès dans la connaissance des mécanismes toxicologiques impliqués dans ces effets nuisibles mérite un effort de recherche accru.

Bibliographie

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4-MaitreA.,V.Bonneterre,L.Huillardetal.«ImpactofUrbanAtmospheric Pollution on Coronary Disease», Eur Heart J 2006, 27, 2275-84.

5- Kunzli N., R. Kaiser, S. Medina. «Public Health Impact of Traffic Related Pollution: a European Study», Lancet 2000, 356, 795-801.

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13- Von Klot S, Peter A Alto P et al. «Ambient Air Pollution is Associated with Increased Risk of Hospital Readmissions of Myocardial Infarction in European Cities», Circulation 2005 112, 3073-9.

14- Pope CA; Ezzati M Dockery DW. «Fine Particulate Air Pollution and Life Expectancy in the United States», New Engl J Med 2009, 360, 376-86.

Translocation systémique

Activation plaquettaire hypercoagulabilité

Evènements thrombotiques

POUMON Médiateurs inflammatoires

Exacerbations aigues des BPCO Asthme – Hypoxie

Tableau I

Pollution de l’air ambiant Inhalation de particules fines

Inflammation pulmonaire Radicaux libres pro inflammatoires Cytokines

Inflammation systémique Dysfonction endothéliale

Inflammation myocardique Ischémie /infarctus

Tableau II

Effets sur SNA

Arythmies

COEUR/ VAISSEAUX Tachycardie

Réduction de la variabilité sinusale Vasoconstriction / hypertension Hypercoagulabilité

Thromboses vasculaires Fragilisation des plaques Ischémie Arythmies Dysfonction ventriculaire

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Discussion

Dans la discussion sont intervenus MM. Alain BOUDET, Henri COUSSE, Jean-Claude FERRAN, Guy FRANCO, Jacques FONTAN, Yves Le PESTIPON, Pierre LILE, Olivier MOCH.

 

 

 

Lyre


Académie des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres de Toulouse
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